Biomécanique

Dynamique lors des virages

Pour quelle raison nous nous penchons à l’intérieur quand nous faisons un virage ? La réponse nous est intuitivement claire, comme en vélo nous devons nous pencher pour ne pas tomber sur la figure. Plus nous allons vite, plus nous devons pencher notre corps vers le centre du virage.

Nous avons le même effet en ski, avec l’avantage, que nous avons deux jambes et skis qui nous facilitent de maintenir l’équilibre. Malgré cela il nous arrive que nous n’arrivons pas à tenir le virage et nous dérapons gentiment vers l’extérieure du virage, soit nous perdons la prise des carres et nous tombons.

« Eh bien, tu dois donner plus de carres pour que le ski tienne » entendons-nous dire. Se mettre plus sur les carres, donner plus d’angle et le virage tiendra, voilà ce qu’il faut faire selon ses dires de tout le monde. Nous savons de l’autre côté que, si nous nous augmentons l’angle au-delà d’un certain angle, la chaussure va toucher la neige et nous perdons l’adhérence. Pourtant, les compétiteurs skient d’une manière plus extrême et ne font que rarement cette expérience. Quelle est la raison ? je ne sais pas ce que les gens s’imaginent en détail concernant ces raison, mais je sais que la majorité des skieurs à des idées fausses.

Quand nous sommes assis sur un carrousel, nous avons l’image suivante :

Plus le carrousel tourne vit plus nous montons et l’angle augmente. Nous atteignons jamais les 90° car :   tan = F1 / F0    

Et nous atteignons  90° seulement si F1 devient infini ou F0 = 0, se qui est impossible vu que nous avons toujours un poids (Si notre poids était zéro, il n’aurait pas non plus de la force centrifuge). Notons que l’angle est celui entre la perpendiculaire et l’axe de notre corps.

En ski les fait sont pratiquement les mêmes, à la différence que nous devons « sentir » cet angle Puisque notre sens d'équilibre est bon en général, nous ne tombons à cause de que sous l’influence des pousse-cafés. D’un point de vue mécanique la situation se complique quelque peu. La force centrifuge agit sur tout le corps, la force opposée, la force centripede, par contre agit sur le corps seulement à travers le contacte neige/skis ce qui provoque un couple.

Un couple est une force qui agit sur un bras de levier.

En physique, toutes les forces qui accélèrent ou freinent un  corps, s’appliquent dans un point imaginaire, le centre de gravité. Toute force qui agit sur un autre point  de ce corps, provoque une rotation. Si je prend un ballon remplis de hélium et je lui donne un coup dans son nœud, il se déplace ET se tourne en même temps, car je ne lui ai pas donné une impulsion dans la direction du centre de gravité.

Des que le vecteur d’une force ne pointe pas vers le centre de gravité du corps auquel il est destiné, ce corps subit une rotation. Le bras de levier applicable est la distance perpendiculaire du centre de gravité au vecteur de cette force.

En ski, les deux forces Ffug et F0 doivent cràer une force résultante qui passe à travers le ski (les skis). Plus je vais vite ou plus le virage est serré, plus je dois me pencher dans le virage. En moto nous avons besoin de pneus  souples pour garantir une adhérence maximale, mais un moment donné ça commence à déraper quand même. En ski nous perdons le contrôle quand la chaussure touche la neige !

Donne plus de carres ! »  … d’accord, mais comment ?

La force résultante doit impérativement passer du centre de gravité aux skis, autrement nous basculons vers l’intérieur ou l’extérieur ( Dans le deuxième cas nous « corrigeons » en dérapant).

Le centre de gravité peut se trouver n’importe où sur le vecteur de la force résultante car pour une force de centrifuge donnée nous trouvons :

 

F0 x a  Ffug x b = const.              (pas important à savoir par cœur, mais cela peut aider)

Car, F0 (le poids) et la force centrifuge Ffug restent inchangés. Quand nous raccourcissons a nous raccourcissons de la même manière linéairement b, autrement nous perdons l’équilibre. En d’autres thermes, le quotient reste constant !

  Si nous nous abaissons ou si nous skions debout, l’angle reste invarié.  Quel que soit notre position, elle ne change rien concernant la prise de carre, car les faits montrés dans la fig. 1  restent valables.

Le centre de gravité change lorsque nous bougeons : selon la position de nos mains il se trouve soit un peu au dessus de nos hanches, soit un peu en dessous. Si nous nous accroupions le centre de gravité reste dans les hanches, mais n’est plus dans le centre du corps. Tout cela ne change rien, aussi longtemps que le centre de gravité reste sur le prolongement du vecteur de la résultante. Mais qu’est-ce qui se passe si nous déplaçons celui-ci en dehors de ce prolongement de la résultante ?

Avec une bascule des hanches nous avons l’effet recherché, le CG (centre de gravité) se trouve en dehors de notre corps (S2).  Le dessin devient, comme on peut constater, un peu plus compliqué.

Pour ne pas perdre l’équilibre, le CG doit revenir sur la ligne de la force résultante. L’angle diminue de nouveau mais ne revient plus à sa grandeur initiale. Nous avons comme résultat que nous devons nous mettre plus sur les carres qu’avec l’autre solution. C’est un effet nondésirable.

Notre CG doit idéalement migrer vers le centre du virage sans que l’angle soit changé. Ainsi, en remettant le CG en la bonne position, l’angle a° diminuerait. Du fait que nos pieds soient tenues fermement dans nos chaussures, ils ne peuvent pas s’adapter au terrain comme un pied nu, donc chaque inclinaison avec le corps se transmet directement et sans variation aux skis.

Si nous tordons notre derrière  vers l’intérieur du virage (via le genou, P1), la position de notre CG change comme souhaité, sans que l’angle soit changé au niveau des skis. Nous devons maintenant remmener le CG sur le vecteur (ou son prolongement) de la résultante, ce qui diminue l’angle ce qui nous donne la possibilité de de faire des virages plus étroits (la force de centrifuge augmente), car nous avons gagné de liberté de mouvement pour la prise de carre.

Des carres bien aiguisées ont une marge d’angle assez grande, dont leur limite supérieure est là ou les chaussures touchent, leur limite inférieure dépend d’un autre facteur que nous reverrons dans le chapitre suivant concernant le dérapage.

Nous avons en ski un atout particulier pour le maintient de notre équilibre : nous skions sur deux skis. De cette manière nous pouvons faire varierla position de  la force résultante selon la largeur de nos skis.

Si nous abaissons notre corps en position schuss, nous pouvons écarter nos skis ultérieurement. Le ski intérieur aura un angle inférieur de celui du ski extérieur et nous avons de nouveau plus de liberté pour varier les angles. Faire des virages en position basse nous sert tout de même !

Nous pouvons regarder le problème sous un autre angle. Comme nous avons vu, une bascule de nos hanches vers l’intérieur du virage est désavantageuse. Une bascule vers l’extérieure par contre nous aiderait par contre (mais attention au dérapage, chapitre suivant !) Skier avec des skis larges peut être assimilé à une bascule vers l’extérieur, car l’angle b° est inférieur à 180°. Il nous serait évidemment possible d’anguler le ski intérieur du virage tout autant que le ski extérieur, mais ce n’est plus naturel du tout. Des que les pied sont en une position plus large que les hanches, les jambes divergent et pour maintenir l’angle, le genou subirait une flexion latérale et une torsion.

Que se passerai-t-il si nous faisions une bascule vers l’extérieure ? Certainement désagréable pour le compétiteur puisqu’il taperait sa tête à chaque porte, à moins que celles-ci ne soient petites comme on les trouve pour le snowboard. Nous devrions réapprendre la technique et le résultat serait plus qu’incertain (voir chapitre « dérapage), mais combien de fois Ingemar Stenmark a-t-il renouvelé la technique de compétition ?

Lors de la bascule traditionnelle  de nos hanches le haut du corps reste plus ou moins verticale ce qui est non négligeable pour notre sens d’équilibre. En faisant le contraire, le haut du corps basculerait dans l’horizontale et notre équilibre serait mise en rude épreuve. L a question clef finalement est : ou est-ce qu’on trouve le meilleure compromis.

Il en reste encore un aspect intéressant. En pivotant le derrière vers l’intérieur du virage, nous orientons notre corps vers l’extérieure, nous faisons donc une contre-rotation ! La contre-rotation à mauvaise presse. Nous parlons beaucoup de co-rotation ou pré-rotation (sauf en virage court). Pourquoi donc les compétiteurs font exactement cela ? En mettant le derrière en cette position, le coureur n’améliore pas seulement sa prise de carre, mais il oriente son haut du corps pour le prochain virage. Le haut du corps limite ainsi les mouvements de rotation entre les portes. Pour chaque rotation qu’on fait, nous accélérons et freinons notre buste, ce qui peut, selon les rayons de virage et leur longueur, comporter une dépense d’énergie excessive. Là réside aussi la raison pour laquelle nous ne bougeons pas le haut du corps en virage court.

Ce que nous pouvons dire des compétiteurs est la chose suivant : pour qu’il soit rapide il doit être efficace. Il doit skier de manière rationnelle (point de vue énergétique) et bio mécaniquement correct. Un coureur qui s’améliore, le fait en règle générale sur le point technique, sans pour autant négliger sa force, mais il n’est pas toujours conscient de ce qu’il fait mieux d’un point de vue théorique, car il s’oriente beaucoup à sa perception du corps. Pourtant, connaitre les raisons peuvent aider un apprenant à faire encore mieux ou plus rapidement, des mal-interprétations d’un phénomène par contre peuvent amener à de mauvais résultats.

Récapitulons :

1.            La bascule de nos hanches  nous permet de faire une prise de carre très rapide, mais nous pose un problème lorsque le rayon du virage devient trop petit ou la vitesse augmente trop, car nous allons toucher avec les chaussures de ski.

2.            La flexion nous permets de skier plus large, ce qui nos confère une meilleure stabilité. Nous pouvons nous rattraper avec le ski intérieur du virage si l’autre devait perdre l’adhérence. En plus, le ski intérieur a un angle a° plus petit que le ski extérieur, et peut donc prendre le relais des que l’autre est en bout de course (angle). Ceci équivaut à une bascule des hanches négative.

3.            Pivoter le derrière vers le centre du virage nous permets de redresser légèrement notre corps ce qui nous donne en échange de la nouvelle liberté pour « mieux anguler ». Ceci nous permets de varier plus facilement le rayon du virage, donc serrer le virage. Il serait certainement avantageux de mettre un peu de plomb dans nos culottes… mais la FIS ne le verrait peut être bas d’un bon œil !

 

Vous trouveriez sur le lien en-bas plein de vidéos de ski que j'ai fait les années précédents.